jeudi 10 novembre 2011

Esprit de Noël ?


Décembre, les vitrines veulent à tout prix être les premières à nous l’annoncer, cette «bonne nouvelle», du moins avant la concurrence, à grand renfort de rennes lumineux, s’il le faut, de flocons à ventouse, de…
Retour aux sources.
Bethlehem, en Cisjordanie, bientôt en Palestine libre, inch’Allah. La ville compte très peu de vitrines, assez toutefois pour que le merchandising de la Nativité s’épanouisse sous le flux de touristes tous plus ou moins pèlerins.

Dans la basilique de la Nativité, voilà une heure que j’attends (certains attendent bien depuis 2'000 ans), dilué dans une horde d’Américains qui n’ont rien de Gaspard, de Melchior, et encore moins de Balthazar. Je fais la file pour visiter la grotte de la Nativité où est incrustée une croix d’argent à 14 branches marquant l’endroit (supposé) de la naissance du Christ.
Esprit de Noël, es-tu là ? Bof. Dans la basilique, Arméniens, Orthodoxes et Catholiques se disputent le moindre centimètre carré. Un vrai partage chrétien. Ainsi, dans ladite grotte, six lanternes appartiennent aux Orthodoxes, cinq aux Arméniens et quatre aux Catholiques. Pas une de plus.
En face de la basilique, sur la place de la Crèche, un panneau propose en trois langues un «guide touristique de l’occupation». Vrai qu’en plein cœur de Bethlehem, un «mur de Sécurité» de huit mètres de haut coupe un quartier en deux et isole les grands-oncles du Christ de ses petits-cousins, les Juifs des Musulmans…
Peut-être faut-il remonter davantage le cours du temps ? À trente kilomètres de là se trouve la ville de Hébron, où Adam, Eve et Abraham seraient enterrés. Seulement voilà, deux voies distinctes mènent au tombeau de ce dernier. L’une m’est interdite, c’est celle de la synagogue (on célèbre la Sukkot). Le passage de la mosquée, lui, est ouvert. Arrivé devant le tombeau d’Abraham, j’observe des Musulmans se recueillir à quelques centimètres des Juifs. Se recueillir sur un même corps, mais venus selon deux chemins distincts, et séparés par une parois épaisse !
Dans les rues, Hébron ressemble à son tombeau. La ville n’a qu’un cœur, mais il est partagé en deux : d’un côté, un marché palestinien très animé, de l’autre, une ville fantôme abritant quelques Juifs ultra-orthodoxes, entre deux, 4’000 soldats israéliens…
Esprit de Noël, tu es las.
Alors je me demande ce qu’il y avait avant Mahomet, Jésus, Abraham, Eve et Adam. Et si c’était justement ce fameux «esprit», un paradis peuplé de rennes lumineux où tombent des flocons à ventouse ?
(JdeM, 10.11.11)