lundi 10 mai 2010

Quand on a mal à sa société

Dans le ciel, les cendres empêchent les touristes de s’envoyer en l’air. Dans les eaux, le pétrole empêche les touristes de barboter. Et entre deux, il y a nous, un rien paumés, naufragés sur une île cerclée de pays au bord de la faillite.
Dimanche dernier, je suis allé chercher un élan d’enthousiasme collectif au stade Saint-Jacques, à Bâle. En vain. Les supporters Lausannois n’y croyaient pas.
C’est tuant, l’asphyxie mentale.
Ça fait qu’on a mal à sa société. C’est alors - quand le ciel se couvre et les eaux se brouillent – qu’il faudrait songer à William, Yassmine et Avinadav.
William Kamkwamba, 22 ans, est né au mauvais endroit, dans une famille de sept enfants, au Malawi. Pas d’argent, pas d’école. William ne baisse pourtant pas les bras, emprunte des livres à la bibliothèque la plus proche et s’aide des illustrations pour construire une éolienne, à partir de branches, de tuyaux, de chaussures usées et d’une vieille bicyclette. Il produit ainsi de l’électricité pour un village qui n’avait alors connu que les bougies pour s’éclairer. Son portrait fait soudain la une du Wall Street Journal, une bourse d’études lui ouvre les portes d’une université sud-africaine, il publie un livre intitulé Créer de l’électricité et de l’espoir.
Yassmine El Ksaihi, 24 ans, préside la mosquée de Polder, en Hollande, une mosquée unique : les prêches se font en hollandais (plutôt qu’en arabe), le lieu est ouvert aux non-musulmans, femmes et hommes prient côte-à-côte. Ainsi, cette marocaine d’origine est parvenue à s'intégrer en terre laïque sans renier ses racines, à donner tort au radicalisme islamique et à la xénophobie ambiante, à renouer le dialogue interreligieux.
Avinadav Begin, 32 ans, petit-fils du fondateur du Likoud, a été élevé en fût ultranationaliste. Ce qui ne l’a pas empêché ensuite de donner le nom de son meilleur ami palestinien (Waadji) à son fils, de participer à des marches pacifistes contre le Mur de Séparation, de publier un livre bilingue hébreu-arabe intitulé La Fin du conflit.
Ces jours-ci, les journaux feraient bien de parler un peu plus de William, Yassmine, Avinadav et de tous ceux qui ont troqué leurs humeurs noires contre des horizons dégagés, ceux qui ne s’agenouillent pas devant ces divinités médiatiques que sont la Catastrophe et la Fatalité.
(publié dans le Journal de Morges)

3 commentaires:

  1. Tu devais vraiment avoir peu d'inspiration pour parler du match de dimanche... mais bon comme d'hab' tu t'en sors et plutôt bien !!

    Bonne vacances et m... à Busset !!:-)

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  2. Non, même plus d'opium dans le football... Mais où sont les moyens oiseaux ?...
    Blaise

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  3. C'est une bouffée d'optimisme qui fait chaud au coeur. Merci de savoir relever certaines bonnes nouvelles qui nous incitent à nous réjouir et à oublier l'esprit chagrin qui nous est trop souvent servi par les médias. Je ne peux que vous inciter à poursuivre dans la même ligne et à nous régaler par vos tribunes libres.
    J. Guignard

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