Pourquoi dit-on « ville »
d’Aubonne alors que ce grand village, oublié de la ligne ferroviaire
Lausanne-Genève en 1858 et dépossédé de son statut de chef-lieu de district en
2008, compte à peine 3'000 habitants ?
Simplement parce qu’en 1234 (moyen
mnémotechnique facile), Aubonne - possédant tous les prérequis d’une
« ville » : château, murailles et marché hebdomadaire - en
obtint le statut.
Et puis saviez-vous qu’en 1970,
cette ville comptait encore trois boucheries, deux laiteries, six épiceries et
trois commerces de vin ? Ou que sur les 2'300 emplois des 250 entreprises sises
à Aubonne, seuls 28% profitent aux habitants ? Qu’à l’inverse, alors qu’en
1980, les Aubonnois voyageaient en moyenne 15 minutes quotidiennement pour
aller travailler, le déplacement dure aujourd’hui 45 minutes ?
Ce sont - entre moult autres !
– des informations glanées dans Aubonne,
charme et dynamisme, un bel ouvrage collectif publié cette année.
Pour le visiteur, Aubonne, c’est
avant tout le dôme de son château. C’est exaltant d’y reconnaître le rêve
oriental d’un baron, une tour imitant le minaret d’une mosquée.
Exaltant aussi de savoir que dans
la cour intérieure de ce château, sur un pavage en galets qui rappelle les
motifs d’un tapis persan, le regretté Franck Jotterand, natif d’Aubonne, y présentait
en 1956 sa Fête des vignerons de La Côte.
Exaltant enfin d’apprendre que ce
château, transformé en prison de district puis en école, compta parmi ses
« roille-gosses » un certain Charles-Ferdinand Ramuz : « je suis maintenant au collège
d’Aubonne, petite ville encore vaguement moyenâgeuse, avec des maisons moussues
sous le lierre, des rues silencieuses et vides, le certain charme des villes
mortes qui gardent des traces d’ancienne vitalité et des vestiges de
fortune ; je donne des leçons au collège où j’ai un remplacement de six
mois. Le métier est le plus ennuyeux qu’on puisse rêver ».
Franck Jotterand - qui a réalisé
en 1961 un film intitulé Ramuz, passage
d’un poète - semblait partager parfois l’ennui de son aîné :
« les Aubonnois sont heureux : ils ont un esprit large et un chemin
de fer à voie étroite. Il s’accoudent à leurs fenêtres bariolées de géraniums
et regardent passer les gens. Il en passe de moins en moins »…
Ces propos annoncent de prochains
défis. En 50 ans, la population d’Aubonne a augmenté de 75%. Puisse son bourg ne
pas devenir un musée, ni sa périphérie, une cité dortoir. Puisse Aubonne
conserver la tradition festive des « Aubonn’apéros », la créativité
d’un Georges de Mestral, inventeur du velcro, et l’imagination foisonnante de
son peintre et sculpteur Eric Moinat ! Puisse Aubonne rester une ville,
vivante et vivifiante !
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